vers une époque post-moderne?


L’Europe, grand marché hétérogène de plus de 300 millions de consommateurs est un marché de plus en plus fluctuant. Dans les pays industrialisés, on peut observer des changements sociologiques évoluant selon des tendances divergentes. Les consommateurs semblent progressivement plus à l’aise dans des situations d’incertitude et de complexité. Ils s’attendent à nouveau à un changement permanent et sont plus fidèles à des marques ou des enseignes qui renouvellent régulièrement leurs gammes qu’à des produits figés dans leur offre.

De nombreux ouvrages s’accordent à démontrer que notre époque est en train d’entrer dans un univers différent que beaucoup qualifient d’époque “postmoderne”. Par opposition à la société moderne caractérisée par des produits identiques pour le plus grand nombre, la société postmoderne semble se focaliser sur un idéal centré sur la personne, sur l’individu.

La postmodernité serait le triomphe de valeurs hédonistes et individualistes. Ce changement, encore imperceptible il y a peu de temps devient de plus en plus évident. Une rupture assez profonde avec notre culture marketing basée sur l’étude et les méthodes destinées à la masse se prépare.

Cinq grands courants qualifient notre époque: la sensualité, le métissage, l’individualisme, l’image et le présent. La connaissance de ces 5 caractéristiques permet de comprendre où sont aujourd’hui les points clés qui régissent le marketing de la personne.

Le sensualisme: il s’agit d’une lame de fond caractéristique de notre temps partout mise en valeur par la communication. La séduction est devenue le processus général tendant à régler la consommation. On peut parler de la revanche du Sud de la Loire - les valeurs chaudes, exubérantes, affectives-, sur le Nord de la Loire, - les valeurs froides, introverties, rationnelles, qui ont présidé au devenir de l’époque moderne.

Le métissage: Une seconde caractéristique est le métissage et l’éclectisme: rien n’est à priori frappé d’illégitimité. De nombreuses réussites de ces derniers mois dans nos métiers se sont fondées sur ce principe. Il n’y a plus ni stéréotype, ni beauté ni laideur, mais une palette infinie de possibilités, de mélanges, d’anachronismes.

L’individualisme: la culture postmoderne rejette le “modèle” comme source de salut et réponses aux crises. L’individu préfère aujourd’hui construire son propre rapport au monde que de s’en approprier des tout fait et ainsi apporter ses touches personnelles et se différencier de la masse.

L’image: la société postmoderne se caractérise par l’appartenance multiple, les individus virevoltent d’une “tribu” à une autre et revêtent pour l’occasion les costumes de scène appropriés. La multiplication des groupes, des tendances, des tribus, entraîne un besoin d’emblèmes de symboles, de références, d’images, de plus en plus pressant.

Le présent: les individus remettent fortement en cause le progrès, qu’ils considèrent comme responsable des crises et des dégradations de l’environnement. Ils se reportent de plus en plus sur le présent et profitent de tout, tout de suite.

Nous sommes loin des grands principes marketing énoncés au début de l’âge d’or de l’époque moderne. Finis les grands standards, finis les produits identiques vendus en masse à la masse, finis les magasins qui se ressemblent tous, finies les marques sans identité ni volonté de se faire aimer par des individus de plus en plus informés, complexes, changeants.

Moderne, postmoderne? Le déclin n’est que celui de nos habitudes, écrit Jean Boissonnat, à nous de nous en séparer pour ne pas dépérir avec. Oui, nous vivons dans une autre époque. Sera-t-elle formidable comme la précédente? Peut-être. Quoi qu’il en soit, elle sera, elle est déjà différente.


02/06/1996